vendredi 5 décembre 2008
lundi 1 décembre 2008
L'attaque des brigades vermeil
Le train Cholet-Nantes de 7h39 est peuplé d’habitués qui partent travailler. Ils se saluent tous les jours, sans vraiment se connaître ; ils partagent les mêmes élans assoupis dans les transports, sans même savoir le nom de leur voisin. Chacun est embrumé de sommeil et profite des saccades de la locomotive pour se bercer encore et prolonger une nuit trop courte. Cet été, j’ai rejoint cette communauté de migrateurs pendulaires, le temps d’arpenter les archives diplomatiques de Nantes. Des allers-retours sans histoires, jusqu’à la tragédie d’un petit matin apparemment comme les autres.
La Bruffière est un village dont le nom ne fleure guère la poésie mais ses coteaux alentour sont fort jolis, à l’instar de sa petite gare pittoresque. C’est là que nous attend la source du drame. Le cauchemar incarné s’est posté au milieu de nulle part, pour mieux surprendre les paisibles voyageurs. Lorsque le train, composé de deux wagons, s’arrête au milieu des bucoliques maisonnettes de campagne, personne ne se doute encore du malicieux complot vermeil. Et soudain…
Un bataillon de petites vieilles en goguette entre dans le wagon. Le volume sonore bondit d’un seul coup. Les six septuagénaires s’installent à grand bruit. Toutes équipées de cabas renforcés, elles portent leurs premiers coups aux passagers qui ont le malheur de laisser dépasser une tête, un bras ou un pied. Les unes en face des autres, elles prennent position au milieu de notre wagon. Elles bloquent ainsi, dans une habile manœuvre, un pauvre homme qui essaye de faire corps avec la fenêtre. Les passagers échangent des regards ou l’amusement se mêle à l’inquiétude.
Au bout de cinq minutes, tout le wagon est au courant de leurs 450 années d’expériences cumulées. La piètre qualité du pain à la boulangerie du bourg, le programme de TéléMatin qu’elles ratent en ce moment même, les diarrhées de leurs vieillards de maris (certaines parlent du conjoint au présent, les autres l’évoquent au passé), les dernières nouvelles du petit voisin qui a mauvais genre et Thérèse, ah… Thérèse… qui ne passera sûrement pas l’été vu qu’hier encore elle rendait tout ce qu’elle mangeait.
La plupart de ces ancêtres sont sourdes et braillent leurs répliques. Les autres, dont l’appareillage auditif fonctionne, hurlent pour couvrir le bruit des copines ou pour se faire comprendre d’elles. Il faut leur reconnaître une capacité étonnante à s’enflammer sur une conversation à deux au sujet des bégonias et à suivre en même temps le sujet «cancer» des deux voisines ainsi que la séquence «retraites qui baissent» des deux autres. Et ces dames d’intervenir à tout bout de champ et de reprendre le fil de leur conversation «nécrologie» sans en perdre le fil.
Deux personnes quittent le wagon, le regard halluciné. C’est une première victoire des brigades vermeil. L'une d'entre elles regarde passer les victimes par dessus ses lunettes, les détaillant des pieds à la tête. Il y aurait peut-être un sujet de conversation à rogner. Les habitués se regardent maintenant avec consternation; la berceuse du train vire au cauchemar. Un ou deux tordent le cou pour jeter un œil sur le pauvre homme, prisonnier de deux des mégères. Il est obnubilé par le paysage les bras crispés sur les accoudoirs. Nous imaginons tous ce qu’il redoute : être pris à parti au détour d’une conversation, être obligé de parler et de briser sa silencieuse quiétude matinale, déjà mise à mal par le brouhaha gériatrique.
La gare de Clisson… horreur, il reste encore vingt minutes de trajet. Mon voisin se penche vers moi avec un air de comploteur et soupire : «Moi, je travaille dans les retraites complémentaires… Je me demande si je ne devrais pas changer de métier quand je vois ce que ça donne de les entretenir». Jamais Nantes n’a paru si éloigné.
Et lorsque nous entrons dans les faubourgs de la ville, elles redoublent d’activité sonore en repassant le programme de leur journée et en préparant leurs immenses sacs à main. L’une a perdu son ticket, l’autre cherche son plan, trois autres racontent les dernières anecdotes qu’elles ont vécues, chez le boucher, chez la belle-fille ou chez la marchande de journaux… La sixième a oublié ce qu’elle voulait dire. Elles se lèvent déjà, se préparent à sortir du train au cas où, à son terminus, il repartirait immédiatement sans elles. Elles sont pressées.
Quand elles se désincarcèrent de leurs fauteuils à grand renfort de plaintes sur les rhumatismes, elles viennent se positionner devant la porte vitrée, une devant chaque rangée de sièges et continuent leurs conversations dans une complexe combinaison d’imbrications : la première avec la cinquième, la sixième avec la troisième et la deuxième avec la quatrième. Du coup, elles poussent un peu plus le volume.
Descendre les deux marches de l’entrée du TER et la marche vers le quai est une grande aventure commune. Alors qu’elles gambadent dans leurs jardins et se vantent de leurs balades à vélo, ces trois degrés à franchir en public deviennent une occasion unique de rivaliser de jérémiades. Bon, j’avoue… l’espace d’un instant, j’ai pensé à Soleil vert, Logan’s run et quelques autres œuvres de science-fiction qui traitent radicalement les problèmes du 3e Age.
La Bruffière est un village dont le nom ne fleure guère la poésie mais ses coteaux alentour sont fort jolis, à l’instar de sa petite gare pittoresque. C’est là que nous attend la source du drame. Le cauchemar incarné s’est posté au milieu de nulle part, pour mieux surprendre les paisibles voyageurs. Lorsque le train, composé de deux wagons, s’arrête au milieu des bucoliques maisonnettes de campagne, personne ne se doute encore du malicieux complot vermeil. Et soudain…
Un bataillon de petites vieilles en goguette entre dans le wagon. Le volume sonore bondit d’un seul coup. Les six septuagénaires s’installent à grand bruit. Toutes équipées de cabas renforcés, elles portent leurs premiers coups aux passagers qui ont le malheur de laisser dépasser une tête, un bras ou un pied. Les unes en face des autres, elles prennent position au milieu de notre wagon. Elles bloquent ainsi, dans une habile manœuvre, un pauvre homme qui essaye de faire corps avec la fenêtre. Les passagers échangent des regards ou l’amusement se mêle à l’inquiétude.
Au bout de cinq minutes, tout le wagon est au courant de leurs 450 années d’expériences cumulées. La piètre qualité du pain à la boulangerie du bourg, le programme de TéléMatin qu’elles ratent en ce moment même, les diarrhées de leurs vieillards de maris (certaines parlent du conjoint au présent, les autres l’évoquent au passé), les dernières nouvelles du petit voisin qui a mauvais genre et Thérèse, ah… Thérèse… qui ne passera sûrement pas l’été vu qu’hier encore elle rendait tout ce qu’elle mangeait.
La plupart de ces ancêtres sont sourdes et braillent leurs répliques. Les autres, dont l’appareillage auditif fonctionne, hurlent pour couvrir le bruit des copines ou pour se faire comprendre d’elles. Il faut leur reconnaître une capacité étonnante à s’enflammer sur une conversation à deux au sujet des bégonias et à suivre en même temps le sujet «cancer» des deux voisines ainsi que la séquence «retraites qui baissent» des deux autres. Et ces dames d’intervenir à tout bout de champ et de reprendre le fil de leur conversation «nécrologie» sans en perdre le fil.
Deux personnes quittent le wagon, le regard halluciné. C’est une première victoire des brigades vermeil. L'une d'entre elles regarde passer les victimes par dessus ses lunettes, les détaillant des pieds à la tête. Il y aurait peut-être un sujet de conversation à rogner. Les habitués se regardent maintenant avec consternation; la berceuse du train vire au cauchemar. Un ou deux tordent le cou pour jeter un œil sur le pauvre homme, prisonnier de deux des mégères. Il est obnubilé par le paysage les bras crispés sur les accoudoirs. Nous imaginons tous ce qu’il redoute : être pris à parti au détour d’une conversation, être obligé de parler et de briser sa silencieuse quiétude matinale, déjà mise à mal par le brouhaha gériatrique.
La gare de Clisson… horreur, il reste encore vingt minutes de trajet. Mon voisin se penche vers moi avec un air de comploteur et soupire : «Moi, je travaille dans les retraites complémentaires… Je me demande si je ne devrais pas changer de métier quand je vois ce que ça donne de les entretenir». Jamais Nantes n’a paru si éloigné.
Et lorsque nous entrons dans les faubourgs de la ville, elles redoublent d’activité sonore en repassant le programme de leur journée et en préparant leurs immenses sacs à main. L’une a perdu son ticket, l’autre cherche son plan, trois autres racontent les dernières anecdotes qu’elles ont vécues, chez le boucher, chez la belle-fille ou chez la marchande de journaux… La sixième a oublié ce qu’elle voulait dire. Elles se lèvent déjà, se préparent à sortir du train au cas où, à son terminus, il repartirait immédiatement sans elles. Elles sont pressées.
Quand elles se désincarcèrent de leurs fauteuils à grand renfort de plaintes sur les rhumatismes, elles viennent se positionner devant la porte vitrée, une devant chaque rangée de sièges et continuent leurs conversations dans une complexe combinaison d’imbrications : la première avec la cinquième, la sixième avec la troisième et la deuxième avec la quatrième. Du coup, elles poussent un peu plus le volume.
Descendre les deux marches de l’entrée du TER et la marche vers le quai est une grande aventure commune. Alors qu’elles gambadent dans leurs jardins et se vantent de leurs balades à vélo, ces trois degrés à franchir en public deviennent une occasion unique de rivaliser de jérémiades. Bon, j’avoue… l’espace d’un instant, j’ai pensé à Soleil vert, Logan’s run et quelques autres œuvres de science-fiction qui traitent radicalement les problèmes du 3e Age.
Le parc du Marquenterre
A ce titre, le parc du Marquenterre, qui constitue la partie terrestre de la réserve naturelle de la baie de Somme, est un bel exemple. Depuis 1973, ce parc ornithologique abrite de très nombreuses espèces (c'est arrêt majeur des migrateurs), dans des espaces naturels où les horizons peuvent s'élargir sans rencontrer l'activité humaine.
mardi 11 novembre 2008
Hill road
Peng Chau
vendredi 24 octobre 2008
Wat Ratchanadaram 2



Wat Ratchanadaram 1


Les paraciels de Jatujak

Par 40 degrés et un taux d'humidité saturé, circuler dans les allées est une gageure, voire une épreuve. Des flux de chairs moites se croisent et se frôlent; les sacs de couleurs vives rehaussent le ton de ce ballet lourd et sans chorégraphie. Dans cette fournaise humaine, le ciel apparait parfois, le temps d'une petite place ou d'une allée, et d'un vendeur de boissons. C'est une voûte basse, bleu acier, menaçante et percée par un soleil agressif; deux bonnes raisons pour sortir d'immenses toiles de patchwork que la bivalence permet d'appeler des paraciels.
dimanche 19 octobre 2008
Fort phra Sumen


jeudi 9 octobre 2008
mardi 30 septembre 2008
L'ambassade de Louis XIV à Lopburi

Hollandais et Anglais sont déjà installés dans la région, dans de petits comptoirs de commerce, et représentent une menace potentielle... Pour faire contrepoids, le roi de Siam ouvre ses portes à l'influence française, représentée par les missionnaires. Louis XIV l'en remercie et Naraï décide d'envoyer une ambassade à Paris, à bord d'un navire de la compagnie des Indes. Le navire sombre au large de Madagascar, il n'y a aucun rescapé. La nouvelle du naufrage ne parvient à Lopburi que deux ans plus tard.
La deuxième tentative, en 1684, est un succès et provoque une vive émotion à la Cour de France. Le seul à pouvoir traduire les propos de la délégation est le Père Vachet, un missionnaire. Il semble qu'il ait prêté aux Siamois des propos allant au-delà de leurs idées... et promet une conversion de Naraï et de son peuple. Le très chrétien Louis XIV, enthousiasmé, arme deux navires et dépêche une poignée de gentilshommes et de missionnaires auprès de "son très cher et bon ami le Roi de Siam".
Pendant ce temps, dans le lointain Orient, la situation politique change. Naraï décline et c'est son premier ministre qui contrôle véritablement le pays. Et quel personnage! Constantin Phaulkon est un aventurier grec au destin hors du commun. Nommé Geraki (faucon en grec), il change son nom en Phaulkon lorsqu'il est au service de la compagnie des Indes à Londres. Il est connu pour ses capacités à apprendre les langues (il en maîtrise au moins six pour sûr) et son esprit quelque peu mystificateur. Arrivé à la Cour du Siam en 1675, il gravit très rapidement l'échelle sociale et devient favori et premier conseiller du Roi. Une position qui lui attire évidemment de nombreux ennemis, qu'il écarte par des moyens expéditifs. Dans les années 1680, sachant son destin lié à celui de Naraï, il pense que la présence française peut l'aider à sauver sa tête à la mort du souverain.
A l'arrivée de la délégation française, en 1685, il couvre de cadeaux les nobles et les missionnaires, leur fait miroiter la conversion de Naraï et ne tarit pas d'éloges sur son pays d'adoption... pour mieux intéresser les Français à s'investir dans cette coûteuse relation. Le projet semble trop ambitieux aux représentants de Louis XIV qui déclinent l'offre, et se contentent d'échanges de traités et de sympathiques intentions.
Phaulkon trouve en revanche une oreille attentive chez le jésuite Tachard; les deux hommes mettent alors en place une véritable diplomatie parallèle. C'est le début d'une nouvelle histoire, moins glorieuse, où un corps expéditionnaire français de 600 hommes met le feu aux poudres siamoises. Les nobles locaux ne supportant plus les ingérences et les manipulations du ministre Grec, déstituent Naraï, renvoient les Français chez eux et exéctutent Phaulkon...
Une référence incontournable pour en savoir plus: http://www.memoires-de-siam.com
Et une lecture: Journal du voyage de Siam, par l'abbé de Choisy, 1687, réédité aux éditions Olizanne en 2006.
Lopburi, phra à phra


mercredi 24 septembre 2008
Lopburi

Lopburi est longtemps restée influente dans la région. Au XVIIe, le roi Narai le Grand en fait même sa deuxième capitale et y construit un magnifique palais (photos). C'est là qu'il reçoit l'ambassade française de Louis XIV.


mardi 23 septembre 2008
lundi 22 septembre 2008
jeudi 11 septembre 2008
L'air d'un Khlong



lundi 8 septembre 2008
Le démon des rizières


Fleur d'évasion

jeudi 28 août 2008
Tonari no Totoro!
Ce film est l'œuvre des studios Ghibli, sûrement pas les plus productifs au Japon mais de loin les plus talentueux. Fondateur de cette entreprise à dessiner du rêve, Hayao Miyazaki est un créateur brillant, un poète écolo à la conscience aussi aiguisée que ses crayons. On lui doit les films les plus connus de Ghibli tels Le chateau dans le ciel, Kiki la petite sorcière, Porco Rosso, Le voyage de Chihiro ou Le Chateau ambulant. Il est aussi le réalisateur, en 1988, du film qui révèle l'esprit et les performances formelles du studio: Mon voisin Totoro, une fable bucolique et enfantine qui distille avec bonheur l'amour de la nature. L'esprit de la forêt, héros du film, est devenu une véritable icone pour les enfants japonais (pour en savoir plus).
Il serait justice de parler également de Isao Takahata dont le Tombeau des lucioles, émouvant périple de deux enfants pendant la Seconde guerre mondiale, n'est en revanche pas à mettre entre les mains des plus jeunes. Sa chronique sociale Mes voisins les Yamada est une amusante introduction à la vie quotidienne des Japonais.
En 23 ans d'existence, Ghibli a fait preuve d'une grande diversité de style et d'une étonnante richesse dans les thèmes abordés. Les oeuvres de ces studios sont des références solides et même des sources d'inspiration voire de plagiat. Le château dans le ciel a été pillé de manière éhontée par les studios Disney, en le vidant au passage de sa substance, pour livrer le médiocre Atlantis.
Pour en savoir plus sur les studios Ghibli: ici ou là.
mercredi 20 août 2008
Tsukiji 3
Tsukiji 2
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