mardi 30 septembre 2008

L'ambassade de Louis XIV à Lopburi

Pourquoi mettre en avant cette ruine qui n'a, visuellement, que peu d'intérêts? Parce qu'elle a hébergé les membres d'une curieuse expédition française à la fin du XVIIe siècle, et cette histoire mérite qu'on s'y arrête un peu. A cette époque, le roi Naraï (1632-1688) gouverne en maître sur le royaume de Siam. Sa capitale est Ayuttaya mais il préfère le climat de Lopburi où il passe le plus clair de son temps, après y avoir édifié son palais.
Hollandais et Anglais sont déjà installés dans la région, dans de petits comptoirs de commerce, et représentent une menace potentielle... Pour faire contrepoids, le roi de Siam ouvre ses portes à l'influence française, représentée par les missionnaires. Louis XIV l'en remercie et Naraï décide d'envoyer une ambassade à Paris, à bord d'un navire de la compagnie des Indes. Le navire sombre au large de Madagascar, il n'y a aucun rescapé. La nouvelle du naufrage ne parvient à Lopburi que deux ans plus tard.
La deuxième tentative, en 1684, est un succès et provoque une vive émotion à la Cour de France. Le seul à pouvoir traduire les propos de la délégation est le Père Vachet, un missionnaire. Il semble qu'il ait prêté aux Siamois des propos allant au-delà de leurs idées... et promet une conversion de Naraï et de son peuple. Le très chrétien Louis XIV, enthousiasmé, arme deux navires et dépêche une poignée de gentilshommes et de missionnaires auprès de "son très cher et bon ami le Roi de Siam".
Pendant ce temps, dans le lointain Orient, la situation politique change. Naraï décline et c'est son premier ministre qui contrôle véritablement le pays. Et quel personnage! Constantin Phaulkon est un aventurier grec au destin hors du commun. Nommé Geraki (faucon en grec), il change son nom en Phaulkon lorsqu'il est au service de la compagnie des Indes à Londres. Il est connu pour ses capacités à apprendre les langues (il en maîtrise au moins six pour sûr) et son esprit quelque peu mystificateur. Arrivé à la Cour du Siam en 1675, il gravit très rapidement l'échelle sociale et devient favori et premier conseiller du Roi. Une position qui lui attire évidemment de nombreux ennemis, qu'il écarte par des moyens expéditifs. Dans les années 1680, sachant son destin lié à celui de Naraï, il pense que la présence française peut l'aider à sauver sa tête à la mort du souverain.
A l'arrivée de la délégation française, en 1685, il couvre de cadeaux les nobles et les missionnaires, leur fait miroiter la conversion de Naraï et ne tarit pas d'éloges sur son pays d'adoption... pour mieux intéresser les Français à s'investir dans cette coûteuse relation. Le projet semble trop ambitieux aux représentants de Louis XIV qui déclinent l'offre, et se contentent d'échanges de traités et de sympathiques intentions.
Phaulkon trouve en revanche une oreille attentive chez le jésuite Tachard; les deux hommes mettent alors en place une véritable diplomatie parallèle. C'est le début d'une nouvelle histoire, moins glorieuse, où un corps expéditionnaire français de 600 hommes met le feu aux poudres siamoises. Les nobles locaux ne supportant plus les ingérences et les manipulations du ministre Grec, déstituent Naraï, renvoient les Français chez eux et exéctutent Phaulkon...

Une référence incontournable pour en savoir plus: http://www.memoires-de-siam.com
Et une lecture: Journal du voyage de Siam, par l'abbé de Choisy, 1687, réédité aux éditions Olizanne en 2006.

Lopburi, phra à phra

Lopburi possède de très beaux phra, vestiges religieux d'époques variées, qui permettent d'avoir un agréable aperçu de la richesse architectural et historique du pays. Le phra est un terme générique désignant un moine ou une statue de Bouddha, et par extension le temple autour... Capitale provinciale du royaume d'Angkor pendant un temps, la cité est marquée par la très forte empreinte du style khmer; devenue plus tard la résidence secondaire des rois d'Ayutthaya, en une période de prospérité, d'autres merveilles sont sorties de terre...

mercredi 24 septembre 2008

Lopburi

Lopburi est aujourd'hui une ville modeste de Thaïlande, à un peu plus de 100 km au Nord de Bangkok. La cité a toutefois eu son heure de gloire, du temps où elle était capitale du royaume Thaï à la période Dvaravati, du VIe au XIe siècles. Son nom était alors Lavo. L'archéologie a révélé trop peu pour permettre des descriptions détaillées de la vie à cette époque. On sait que l'influence de l'Inde y a été importante et qu'à ce titre, la ville a sûrement joué un rôle clé dans la diffusion du bouddhisme.
Lopburi est longtemps restée influente dans la région. Au XVIIe, le roi Narai le Grand en fait même sa deuxième capitale et y construit un magnifique palais (photos). C'est là qu'il reçoit l'ambassade française de Louis XIV.

jeudi 11 septembre 2008

L'air d'un Khlong

Khlong est un terme générique pour un cours d'eau. A Bangkok, il s'agit tout particulièrement des canaux qui quadrillaient autrefois toute la ville et qui ont aujourd'hui presque tous disparu. C'était d'importantes artères de la capitale, pour le commerce (marchés flottants), pour l'hygiène (égouts) et le transport... Cette dernière activité subsiste à quelques endroits et il est toujours possible de filer entre les rives de quartiers populaires et typiques, pour une poignée de baths. A deux pas des grands centres commerciaux et des routes embouteillées, l'eau clapote et s'agite au passage des longues embarcations. Les habitués sautent rapidement dans le bateau et un commis coiffé d'un casque de chantier circule sur le bord pour encaisser la course. Les gerbes d'eau jaillissent, un employé de bureau se précipite sur la sangle pour tirer la bache... Direction le prochain embarcadère à toute vitesse.

lundi 8 septembre 2008

Le démon des rizières

Prendre une moto et partir au milieu de nulle part sous prétexte de découvrir un obscur temple repéré sur la carte. Et planer sur l'étendue des rizières, sur ces verts multiples et dégradés; survoler des heures durant l'Asie du Sud-Est dans ce qu'elle a de plus caractéristique et pur, son océan nourricier, rectiligne dans ses formes et varié à l'infini dans ses couleurs. Là, le vent pousse les vagues dans une nuance de céladon et un doux frémissement; là encore, la terre à nue lissée d'eau adresse un clin d'œil au soleil. Soudain, le protecteur halluciné et kitch d'un temple ouvre grand sa gueule sur le paysage. Sur cette vision incongrue, la route reprend sur sa langue de terre...

Fleur d'évasion

Le lotus est chargé de symboles en Thaïlande comme partout ailleurs en Asie du Sud-Est. Les légendes sont nombreuses à mettre en scène cette plante aquatique aux couleurs vives. Est-ce un hasard si le nom de cette espèce est "lotus sacré"? Qu'un oiseau soit venu y laisser une partie de son plumage pourrait donner lieu à de nouvelles divagations poétiques.

Jasmin de Siam

Une nouvelle série commence, plus courte cette fois, sur les routes de Thaïlande à la rencontre du royaume de Siam. De Bangkok à Lopburi, souvenirs d'une petite expédition au pays du sourire.