mercredi 27 mai 2009

Le palais de la prospérité... et son fantôme

Il est strictement interdit de visiter ce palais seul. Les visites en anglais sont rares, et c'est donc avec quelques japonais que j'arpente Changdeokgung. Alors que ces derniers peinent à marcher, loin derrière, je file derrière la vaporeuse guide qui nous a été attribuée. Sa longue robe et sa démarche donnent l'impression qu'elle lévite à quelques centimètres du sol. Elle avance dans le dédale royal avec l'assurance d'une âme errante, qui n'a plus rien à découvrir.

Le palais de la prospérité... et son jardin secret


Changdeokgung, est sans doute le palais le plus impressionnant qu'il m'ait été donné de voir à Séoul. Classé au patrimoine mondial de l'Unesco, cet ensemble varié d'édifices en bois a été construit entre le 15e et le 19e siècle. L'enceinte comprend également le jardin secret de la famille royale, véritable forêt dans laquelle sont discrètement disséminés, ça et là, quelques pavillons de plaisir. Le "ruisseau aux eaux de jade" serpente avec nonchalance vers les bassins d'agrément.

lundi 25 mai 2009

DMZ

Inutile de retracer l'histoire mouvementée des tensions qui animent la Corée du Nord et la Corée du Sud depuis plus de cinquante ans. S'approcher de cette frontière, c'est vivre un peu de ce qui a conduit au repli sur soi d'une des dictatures les plus absurdes et outrancière de la planète. La situation serait cocasse, quand on pense à l'art et aux manières de la dynastie initiée par Kim Il-sung, s'il n'y avait en conséquence des millions de morts derrière ce pont.
Il y a des lieux de mémoire et des moments, souvent précis et courts, où une intensité profonde est palpable. Cette pluvieuse matinée d'août 2008 aux abords de la zone démilitarisée (DMZ), en fait partie. Non qu'il y ait un quelconque risque... puisque la visite est organisée et rodée depuis bien longtemps. Certains lieux ont même été aseptisés et il y a, de la part des intervenants Sud-coréens, une claire volonté de dédramatiser. L'espoir de réconciliation est clamé, et toute agression est nécessairement nordiste dans le discours officiel. Il est également clair que le tourisme est une carte d'apaisement jouée dans le contexte de tension frontalière.
Une touriste Sud-coréenne ayant été tuée un mois auparavant, la Joint Security Area, fameuse zone de contact entre le Nord et le Sud, est fermée. C'est là notamment que les soldats en faction portent des lunettes de soleil pour éviter le regard des opposants... et donc tout éventuel signe d'agression.
Au-delà du musée, du village de résistants et de la descente dans le sombre tunnel d'infiltration (l'une des nombreuses tentatives repoussée, à 70m sous terre), le Dora observatory est peut-être le moment le plus révélateur de l'ambiance. Il s'agit d'un poste d'observation avec une vue imprenable sur la DMZ. Comme presque partout, les photos sont interdites, les restrictions nombreuses... Par delà le parapet, quelques collines se dessinent dans la brume. C'est le début d'une des plus féroces tyrannies modernes. A la faveur d'un brutal coup de vent, quelques nuages s'éparpillent... au bout d'un gigantesque mat, apparaît le drapeau nord-coréen. Le plus haut drapeau du monde, hissé à 160m de hauteur, comme une harangue prétentieuse et provocatrice...

Au cas où...

Métro de Séoul, un soir. Ces petits sacs en toile de jute contiennent des masques à gaz; une trentaine tout au plus. La psychose d'une éventuelle attaque nord-coréenne n'est pas particulièrement visible, mais certains détails ne trompent pas. C'est le prétexte pour organiser une visite vers la fameuse zone démilitarisée, entre la Corée du Nord et son homologue sudiste.

samedi 23 mai 2009

Olympiades franco-coréennes

Août 2008, dans une gare de Séoul. Les yeux sont rivés sur un match de Taekwondo. L'affaire semble sérieuse... car "la voie du pied et du poing" selon la traduction est un sport national. Comme beaucoup d'arts martiaux les origines du Taekwondo sont ancestrales, mais l'acte de naissance officiel de ce sport remonte à 1955, lorsqu'un général coréen lui a donné ses règles et son code en se basant sur des principes "d'autodéfense rationnelle". Il s'agit surtout, à cette époque, d'aider une Corée meurtrie à relever la tête avec un art martial qui puisse être identifié comme national et non Chinois ou Japonais.
Détail amusant, la compétitrice coréenne est ici opposée à une... française. Le combat est rude. Les spectateurs semblent désapprouver leur héraut qui est en difficulté à de nombreuses reprises,. Elle gagne pourtant. Pas de ferveur, quelques dodelinements de la tête font comprendre que l'art et la manière n'y étaient pas.

jeudi 21 mai 2009

Shazam!

La foire au kitch

Un souterrain pour passer sous une rocade. Dans n'importe quel pays, ce serait un endroit glauque aux fortes odeurs d'ammoniaque, suintant l'humidité dans la semi-obscurité. Au regard de mes premières impressions sur le pays, je m'y attendais d'autant plus. Et me voilà propulsé dans un kitschissime couloir, débordant de moletons roses et de dentelles sucrées.

mardi 19 mai 2009

La ville du paradoxe anxieux

Toujours une chape de plomb sur la ville, et personne, ou presque, dans les différents monuments. D'où une très étrange atmosphère où l'ancien coloré se mêle au moderne gris. J'ai l'impression d'évoluer dans des décors de cinéma qui n'ont jamais servi. Du moins le jour...
Car la nuit, Séoul provoque un tout autre effet. Après que tous les stricts hommes d'affaire ont été relâchés de leurs bureaux, la ville s'anime étrangement. Les passantes disparaissent et les rues se peuplent d'ivrognes en costumes trois pièces, seuls ou en groupes. Beuglards zigzaguant sur les trottoirs, solitaires éplorés cuvant sur des marches. L'ampleur du phénomène est ahurissante. Je ne peux croire que ce soit isolé et exceptionnel puisque chaque nuit passée dans cette ville, dans différents quartiers, apporte son lot de pitoyables scènes. Il est malaisé de se lancer dans une analyse sur les causes de ces problèmes, mais il y a sûrement à dire sur la pression au travail et l'alcoolisme entre collègues.

Le palais de la vive réjouissance

Changgyeonggung... Ils sont tous à côté les uns des autres, portent des noms coréens apparemment similaires et des traductions toutes aussi baroques: les différents palais royaux sont autant d'appels au calme et à la nature. Pourtant, à regarder de plus près leur histoire, ce ne sont que d'incessantes guerres contre le Japon avec leur lot d'incendies... et de reconstructions, paradoxalement inspirées par les édifices nippons. Quand ce n'est pas la Chine.
Coincée entre deux puissances envahissantes, la Corée semble vivre une double schizophrénie, qui doit pouvoir expliquer un certain nombre de choses sur sa civilisation.

Le palais de félicité radieuse

Gyeongheuigung... Impossible de savoir ce que ces messieurs d'un autre temps, endimanchés pour la parade, font ici. En revanche, pour continuer sur l'impression de décor de cinéma, c'est réussi. Comme tous les autres palais, celui-ci est un fort bel étalage des prouesses techniques en matière de constructions en bois. En évoquant toujours fortement les édifices japonais, je commence à saisir quelques nuances, notamment dans les codes de couleurs; mais il faut bien l'avouer, beaucoup de choses restent hermétiques.

dimanche 17 mai 2009

Jongmyo, sanctuaire royal

Alors que la ville m'apparait rapidement étouffante et terne, les nombreux palais qu'elle contient sont d'agréables occasions de se ressourcer dans la nature, certes fortement domestiquée. Encore une fois, la sensation de vide est frappante. Tout est propre, presque aseptisé, et il n'y a pas un chat.

Le palais de la longévité vertueuse

Deoksugung de son petit nom... le palais de la longévité vertueuse parait bien triste sous la pluie fine et continue. Les bâtiments sont vides, et je suis seul à parcourir les allées.
La porte monumentale à l'entrée est du XVe siècle, mais le temps s'écoule à mesure qu'on progresse dans le palais. Au fond, trône un édifice des années 40 d'inspiration vaguement Art Déco. Le cheminement et les juxtapositions sont détonants.

mardi 12 mai 2009

Au pays des matins calmes

Entre Paris et Hong Kong, une escale de quelques jours pour finir un été de pérégrinations. Un impromptu rapide, sorte de fugue vers l'inconnu, dans un pays ni rêvé ni rejeté. Sans préméditation, c'est une visite de couroisie chez un voisin, celui qui habite en face, qu'on croise souvent et qu'on ne connaît finalement pas du tout.

vendredi 1 mai 2009

Grote kerk - Haarlem

Un dernier billet sur cette escapade aux Pays-Bas. Il eut été dommage de passer rapidement sur Haarlem; la ville évoque la conquête du Nouveau Monde et un quartier de New York aujourd'hui bien plus célèbre qu'elle. C'est aussi un lieu, parmi d'autres, de la confrontation des religions catholiques et protestantes. Au milieu de la cité, se dresse cette magnifique "grosse église", ou Grote kerk, autrefois consacrée à Saint-Bavon. Les échoppes collées à son flanc lui conservent son caractère médiéval, et son gothique élancé qui repose sur des bases puissantes impose le respect depuis plusieurs siècles. Le caractère confiné du quartier ne permet pas un recul suffisant pour apprécier la taille de l'édifice; l'accès s'y fait en passant à travers deux maisons collées au mur du bâtiment... et c'est seulement lorsqu'on découvre l'immense espace contenu à l'intérieur que l'on prend conscience de l'ampleur de la construction. L'impression de clarté et la luminosité tranchent avec les ruelles alentour. L'effet est réussi, et il devait l'être d'autant plus sur le quidam médiéval sortant de son habitation en bois mal éclairée... Longtemps catholique, cette église puis cathédrale a été reprise par les protestants au XVIe siècle: l'enjeu était de taille. Les tenants de la Réforme ont évidemment dépouillé le lieu de toutes fioritures et leur caractéristique simplicité dans la décoration ne fait qu'ajouter à la grandeur et à la luminosité. Enfin, pour l'anecdote, il y a un orgue immense au fond, qui fut, dans la première moitié du XVIIe, l'instrument le plus grand du monde. Mozart, Haëndel, Mendelssohn sont venus y jouer...